Corée du Nord
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Kim Jong-Il tient soigneusement ses compatriotes à l’écart du reste du monde et de la Toile. Toutefois, en 2010, le pays a fait son entrée sur les réseaux sociaux, mais pour y mener sa guerre de propagande. Alors que le « Cher Leader » prépare sa succession, les premières connexions directes au World Wide Web depuis la Corée du Nord auraient récemment été constatées.
Internet, chasse gardée de l’élite
L’accès au World Wide Web, dans ce pays coupé du monde, n’est accessible qu’à une faible minorité : quelques membres haut placés du régime et les diplomates étrangers, grâce uniquement, au moins jusqu’à la fin 2010, à une liaison satellite avec des serveurs basés à l’étranger. L’immense majorité de la population est maintenue à l’écart du Web. Une minorité a accès à un intranet comptant une boîte de réception d’emails, quelques sites d’informations relayant la propagande du régime et un navigateur qui donne accès aux pages web des banques de données des trois plus grandes bibliothèques du pays : la Grande Maison d’études du peuple et les Universités Kim Il-sung et Kim Chaek. Cet intranet est réservé à des universitaires, des hommes d’affaires et des hauts fonctionnaires qui ont obtenu une autorisation spéciale. Ces derniers mois, des informations provenant du World Wide Web et triées sur le volet ont été rendues disponibles sur l’intranet. Des universités seraient en mesure d’utiliser des logiciels libres téléchargés depuis le Web. Les rares cybercafés de la capitale sont principalement utilisés comme des lieux de divertissement, grâce à leurs points d’accès à des ordinateurs et à des jeux. En revanche, quand des étrangers sont invités en Corée du Nord, le régime sort le grand jeu. A l’occasion du 65ème anniversaire de la fondation du Parti des travailleurs de Corée, en octobre 2010, les quelque 80 journalistes étrangers invités pour couvrir la parade militaire bénéficiaient d’un accès total à Internet depuis l’hôtel Koryo qui les hébergeait. Cette parade a marqué les débuts officiels de Kim Jong Un, le fils de Kim Jong Il, en tant qu’héritier désigné, désormais membre du comité central du parti et de la Commission militaire centrale. Coïncidant avec ces célébrations, la Corée du Nord aurait, en octobre 2010, effectué sa première connexion au World Wide Web depuis son sol, comme l’explique Martyn Williams d’IDG News Services. Premières connexions directes au World Wide Web depuis la Corée du Nord ?
La Corée du Nord utilisait jusqu’à maintenant des serveurs basés à l’étranger pour connecter ses sites au reste du monde. C’est en train de changer. Des sites utilisant le nom de domaine coréen .kp feraient progressivement leur entrée en service. Les serveurs qui gèrent les noms de domaine sont désormais situés sur un réseau dénommé Star JV Network, une joint-venture entre le gouvernement coréen et une compagnie thaïlandaise Loxley Pacific. Six nouveaux domaines de second niveau auraient été enregistrés, en plus de com.kp and edu.kp. Il s’agit de : net.kp, gov.kp, org.kp, rep.kp, tra.kp and co.kp. Parmi eux, - Naenara, une plateforme multilingue du Centre informatique de Corée, basé à Pyongyang. - le Comité pour les relations culturelles avec les pays étrangers Par ailleurs, plus de 1000 adresses IP assignées à la Corée du Nord par l’ICANN, l’organisation qui gère les noms de domaine à l ‘échelle mondiale, sont utilisées depuis peu. Ce qui laisse à penser que des serveurs seraient désormais installés dans le pays, permettant un accès au réseau international depuis la Corée du Nord. Une nouveauté. Les raisons de ce revirement restent floues. S’agit-il d’une tentative de reprendre le contrôle direct des sites hébergés jusqu’ici à l’étranger, pour des raisons idéologiques et pratiques ? Quoi qu’il en soit, au moment où le pays ferait son entrée directe sur le réseau international, le régime se lance, parallèlement, dans une guerre de propagande particulièrement agressive sur les réseaux sociaux. La guerre de propagande en ligne
Les relations tendues entre les deux Corées trouvent une caisse de résonance dans les médias et sur la Toile. La Corée du Sud a repris la diffusion de messages de propagande par radio suite à l’incident de torpillage d’un de ses navires, dont elle a accusé le Nord d’être responsable. Pyongyang a décidé de riposter, notamment sur Internet. Le régime a décidé de tirer avantage des réseaux sociaux, en créant des comptes Twitter (comptant 11 463 abonnés), YouTube (dont le total des vues pour toutes les vidéos atteint le chiffre de 816334), sous le nom d’utilisateur « Uriminzokkiri », qui signifie « notre nation » en coréen. Un compte à ce nom avait été effacé par Facebook en août 2010, mais un nouveau groupe similaire a vu le jour peu de temps après et compte près de 500 membres. Le site Internet uriminzokkiri.com est dirigé par le Comité pour la Réunification pacifique de la Corée, un département de la propagande basé à Pyongyang. Il s’apparente à une présence officielle du Nord sur le Web. Ces sites et comptes ont fait l’objet de cyberattaques ces derniers mois. Pour reprendre la formule employée par Choe Sang-Hun dans le New York Times, la Corée du Nord a, en 2010, « porté sa guerre de propagande contre la Corée du Sud et les Etats-Unis » sur le Web. Cette propagande virulente vise particulièrement la Corée du Sud et les Etats-Unis. Dans l’un des clips postés sur le compte YouTube, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton est qualifiée de « ministre en jupe », le secrétaire à la Défense, Robert Gates de « maniaque de la guerre » et l’ancien ministre de la défense sud-coréen Kim Tae-young, de « chien servile » de son « maître américain ». Il est vrai que les autorités sud-coréennes bloquent de leur côté l’accès de leurs citoyens aux sites du Nord (voir le chapitre Corée du Sud). Contrebande de l’information
Le service de téléphonie mobile proposé par la société égyptienne Orascom, concentré sur Pyongyang et quelques grandes villes du Sud, a été étendu à d’autres villes, notamment frontalières. Il ne permet ni l’accès à Internet ni les appels internationaux et demeure trop cher pour la majorité de la population, mais le nombre de téléphones portables en circulation dans le pays aurait augmenté. Deux types de numéro sont alloués respectivement aux étrangers et aux Coréens. Il est impossible de téléphoner de l’un à l’autre. Les autorités surveillent ces communications. La police politique traque ceux qui seraient tentés d’utiliser les télécommunications pour briser le contrôle. La contrebande de l’information se joue dans les régions frontalières. Le peu d’informations qui entrent dans le pays passent par la frontière avec la Chine, sous forme de CD et de DVD qui sont introduits clandestinement. Un marché noir y prospère. Les téléphones en provenance de Chine permettent de passer des coups de fil en captant le signal à la frontière. L’introduction récente de téléphones 3G en Chine pourrait aussi permettre un meilleur accès à Internet depuis ces régions. Parmi les autres sources d’informations alternatives : le site Dailynk, animé par des réfugiés nord-coréens basés en Corée du Sud. Les radios indépendantes qui émettent de la Corée du Sud vers la Corée du Nord, Free North Korea Radio, Radio Free Chosun, Open Radio for North Korea et North Korea Reform Radio, collectent notamment leurs informations en appelant des contacts basés à la frontière avec la Chine. Cependant, les autorités ont annoncé, début 2010, un renforcement de la répression contre ceux qui font défection et par la même occasion un contrôle accentué des moyens de communication à la frontière, visant notamment les téléphones portables chinois utilisés en Corée du Nord. Le régime s’est targué d’avoir les moyens “d’écraser les forces réactionnaires” et aurait d’ores et déjà montré l’exemple en faisant fusiller, en janvier 2011, un ouvrier accusé d’avoir utilisé un portable chinois “illégal”. Il utiliserait désormais des services de captation du signal afin de localiser et d’arrêter les fautifs. Les Coréens qui utilisent ces téléphones prennent donc soin de limiter leurs communications. Dans ce contexte, les premières connexions potentielles depuis le pays vers le World Wide Web ne doivent pas être vues comme une révolution ni l’amorce de la généralisation de l’accès des Coréens du Nord à cette fenêtre ouverte sur le monde extérieur. Ce serait trop dangereux pour le régime. Ces connexions dénotent-elles une nouvelle impulsion donnée par le dauphin du régime que l’on dit rompu aux techniques informatiques ? Ou bien une volonté, parallèlement à la récente modernisation de l’industrie, d’ouvrir partiellement le Web aux business ? Quoi qu’il en soit, les autorités restent obnubilées par le contrôle à tout prix de la population, ce qui passe par un contrôle du Net et surtout par la mise à l’écart du Web de la majorité de la population. La nouvelle présence de la Corée du Nord sur la Toile semble donc davantage dédiée à diffuser de l’information officielle depuis le pays, plutôt qu’à y laisser entrer une information non validée par le pouvoir.
L’accès au World Wide Web, dans ce pays coupé du monde, n’est accessible qu’à une faible minorité : quelques membres haut placés du régime et les diplomates étrangers, grâce uniquement, au moins jusqu’à la fin 2010, à une liaison satellite avec des serveurs basés à l’étranger. L’immense majorité de la population est maintenue à l’écart du Web. Une minorité a accès à un intranet comptant une boîte de réception d’emails, quelques sites d’informations relayant la propagande du régime et un navigateur qui donne accès aux pages web des banques de données des trois plus grandes bibliothèques du pays : la Grande Maison d’études du peuple et les Universités Kim Il-sung et Kim Chaek. Cet intranet est réservé à des universitaires, des hommes d’affaires et des hauts fonctionnaires qui ont obtenu une autorisation spéciale. Ces derniers mois, des informations provenant du World Wide Web et triées sur le volet ont été rendues disponibles sur l’intranet. Des universités seraient en mesure d’utiliser des logiciels libres téléchargés depuis le Web. Les rares cybercafés de la capitale sont principalement utilisés comme des lieux de divertissement, grâce à leurs points d’accès à des ordinateurs et à des jeux. En revanche, quand des étrangers sont invités en Corée du Nord, le régime sort le grand jeu. A l’occasion du 65ème anniversaire de la fondation du Parti des travailleurs de Corée, en octobre 2010, les quelque 80 journalistes étrangers invités pour couvrir la parade militaire bénéficiaient d’un accès total à Internet depuis l’hôtel Koryo qui les hébergeait. Cette parade a marqué les débuts officiels de Kim Jong Un, le fils de Kim Jong Il, en tant qu’héritier désigné, désormais membre du comité central du parti et de la Commission militaire centrale. Coïncidant avec ces célébrations, la Corée du Nord aurait, en octobre 2010, effectué sa première connexion au World Wide Web depuis son sol, comme l’explique Martyn Williams d’IDG News Services. Premières connexions directes au World Wide Web depuis la Corée du Nord ?
La Corée du Nord utilisait jusqu’à maintenant des serveurs basés à l’étranger pour connecter ses sites au reste du monde. C’est en train de changer. Des sites utilisant le nom de domaine coréen .kp feraient progressivement leur entrée en service. Les serveurs qui gèrent les noms de domaine sont désormais situés sur un réseau dénommé Star JV Network, une joint-venture entre le gouvernement coréen et une compagnie thaïlandaise Loxley Pacific. Six nouveaux domaines de second niveau auraient été enregistrés, en plus de com.kp and edu.kp. Il s’agit de : net.kp, gov.kp, org.kp, rep.kp, tra.kp and co.kp. Parmi eux, - Naenara, une plateforme multilingue du Centre informatique de Corée, basé à Pyongyang. - le Comité pour les relations culturelles avec les pays étrangers Par ailleurs, plus de 1000 adresses IP assignées à la Corée du Nord par l’ICANN, l’organisation qui gère les noms de domaine à l ‘échelle mondiale, sont utilisées depuis peu. Ce qui laisse à penser que des serveurs seraient désormais installés dans le pays, permettant un accès au réseau international depuis la Corée du Nord. Une nouveauté. Les raisons de ce revirement restent floues. S’agit-il d’une tentative de reprendre le contrôle direct des sites hébergés jusqu’ici à l’étranger, pour des raisons idéologiques et pratiques ? Quoi qu’il en soit, au moment où le pays ferait son entrée directe sur le réseau international, le régime se lance, parallèlement, dans une guerre de propagande particulièrement agressive sur les réseaux sociaux. La guerre de propagande en ligne
Les relations tendues entre les deux Corées trouvent une caisse de résonance dans les médias et sur la Toile. La Corée du Sud a repris la diffusion de messages de propagande par radio suite à l’incident de torpillage d’un de ses navires, dont elle a accusé le Nord d’être responsable. Pyongyang a décidé de riposter, notamment sur Internet. Le régime a décidé de tirer avantage des réseaux sociaux, en créant des comptes Twitter (comptant 11 463 abonnés), YouTube (dont le total des vues pour toutes les vidéos atteint le chiffre de 816334), sous le nom d’utilisateur « Uriminzokkiri », qui signifie « notre nation » en coréen. Un compte à ce nom avait été effacé par Facebook en août 2010, mais un nouveau groupe similaire a vu le jour peu de temps après et compte près de 500 membres. Le site Internet uriminzokkiri.com est dirigé par le Comité pour la Réunification pacifique de la Corée, un département de la propagande basé à Pyongyang. Il s’apparente à une présence officielle du Nord sur le Web. Ces sites et comptes ont fait l’objet de cyberattaques ces derniers mois. Pour reprendre la formule employée par Choe Sang-Hun dans le New York Times, la Corée du Nord a, en 2010, « porté sa guerre de propagande contre la Corée du Sud et les Etats-Unis » sur le Web. Cette propagande virulente vise particulièrement la Corée du Sud et les Etats-Unis. Dans l’un des clips postés sur le compte YouTube, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton est qualifiée de « ministre en jupe », le secrétaire à la Défense, Robert Gates de « maniaque de la guerre » et l’ancien ministre de la défense sud-coréen Kim Tae-young, de « chien servile » de son « maître américain ». Il est vrai que les autorités sud-coréennes bloquent de leur côté l’accès de leurs citoyens aux sites du Nord (voir le chapitre Corée du Sud). Contrebande de l’information
Le service de téléphonie mobile proposé par la société égyptienne Orascom, concentré sur Pyongyang et quelques grandes villes du Sud, a été étendu à d’autres villes, notamment frontalières. Il ne permet ni l’accès à Internet ni les appels internationaux et demeure trop cher pour la majorité de la population, mais le nombre de téléphones portables en circulation dans le pays aurait augmenté. Deux types de numéro sont alloués respectivement aux étrangers et aux Coréens. Il est impossible de téléphoner de l’un à l’autre. Les autorités surveillent ces communications. La police politique traque ceux qui seraient tentés d’utiliser les télécommunications pour briser le contrôle. La contrebande de l’information se joue dans les régions frontalières. Le peu d’informations qui entrent dans le pays passent par la frontière avec la Chine, sous forme de CD et de DVD qui sont introduits clandestinement. Un marché noir y prospère. Les téléphones en provenance de Chine permettent de passer des coups de fil en captant le signal à la frontière. L’introduction récente de téléphones 3G en Chine pourrait aussi permettre un meilleur accès à Internet depuis ces régions. Parmi les autres sources d’informations alternatives : le site Dailynk, animé par des réfugiés nord-coréens basés en Corée du Sud. Les radios indépendantes qui émettent de la Corée du Sud vers la Corée du Nord, Free North Korea Radio, Radio Free Chosun, Open Radio for North Korea et North Korea Reform Radio, collectent notamment leurs informations en appelant des contacts basés à la frontière avec la Chine. Cependant, les autorités ont annoncé, début 2010, un renforcement de la répression contre ceux qui font défection et par la même occasion un contrôle accentué des moyens de communication à la frontière, visant notamment les téléphones portables chinois utilisés en Corée du Nord. Le régime s’est targué d’avoir les moyens “d’écraser les forces réactionnaires” et aurait d’ores et déjà montré l’exemple en faisant fusiller, en janvier 2011, un ouvrier accusé d’avoir utilisé un portable chinois “illégal”. Il utiliserait désormais des services de captation du signal afin de localiser et d’arrêter les fautifs. Les Coréens qui utilisent ces téléphones prennent donc soin de limiter leurs communications. Dans ce contexte, les premières connexions potentielles depuis le pays vers le World Wide Web ne doivent pas être vues comme une révolution ni l’amorce de la généralisation de l’accès des Coréens du Nord à cette fenêtre ouverte sur le monde extérieur. Ce serait trop dangereux pour le régime. Ces connexions dénotent-elles une nouvelle impulsion donnée par le dauphin du régime que l’on dit rompu aux techniques informatiques ? Ou bien une volonté, parallèlement à la récente modernisation de l’industrie, d’ouvrir partiellement le Web aux business ? Quoi qu’il en soit, les autorités restent obnubilées par le contrôle à tout prix de la population, ce qui passe par un contrôle du Net et surtout par la mise à l’écart du Web de la majorité de la population. La nouvelle présence de la Corée du Nord sur la Toile semble donc davantage dédiée à diffuser de l’information officielle depuis le pays, plutôt qu’à y laisser entrer une information non validée par le pouvoir.
Publié le
Updated on
20.01.2016