Le fondateur et rédacteur en chef du principal média d’investigation cachemiri The Kashmir Walla, a été arrêté et risque la prison à perpétuité pour "sédition". RSF demande à l'administration du Jammu-et-Cachemire la libération immédiate et inconditionnelle du journaliste, reconnu à l’international pour la qualité de son travail.


Mise à jour du 23/11/2023 : Après quasiment deux ans de détention, le rédacteur en chef du Kashmir Walla, Fahad Shah, sous le coup de lois anti-terrorisme, a été libéré sous caution par la haute cour du Jammu-et-Cachemire. Il a pu quitter la prison de Kot Balwal ce jeudi 23 novembre. Le tribunal a annulé certaines accusations portées contre lui, telles que celles de "complicité de terrorisme", de "guerre contre le pays" et de "promotion de l'inimitié", en vertu de la loi sur la prévention des activités illégales (UAPA). Le tribunal a cependant maintenu les accusations relevant de cette même loi et de celle sur les contributions étrangères.​


C’est par un tweet que la police a annoncé ce qui était reproché au rédacteur en chef The Kashmir Walla, au lendemain de son arrestation le 4 février, dans la ville de Pulwama, dans le sud de l’Etat du Jammu-et-Cachemire (nord de l’Inde). Fahad Shah est simultanément visé par trois chefs d’accusation : “apologie du terrorisme”, “diffusion de fausses nouvelles”, et “incitation au grand public à la violence et à la haine”. Il risque pour cela la prison à perpétuité en vertu de l’article 124 (A) du code pénal indien.    

Le fondateur du principal média d’investigation cachmiri a été convoqué par la police puis arrêté après la couverture par The Kashmir Walla d'une fusillade entre des militants et les forces gouvernementales le 30 janvier dernier. Ce n’est pas la première fois que le journaliste, qui avait été nominé en 2020 au Prix RSF dans la catégorie Courage, est ainsi convoqué par la police en raison de ses articles. Mais jamais les chefs d’accusation n’avaient été aussi graves.  

“Un journaliste ne peut être jeté en prison et risquer d’y passer sa vie pour avoir simplement fait son travail et couvert un fait d’actualité, dénonce la porte-parole de RSF, Pauline Adès Mével. Cette arrestation est un signe inquiétant et confirme que le journalisme indépendant est en train de disparaître du Cachemire indien. Nous appelons les autorités locales à libérer immédiatement et inconditionnellement Fahad Shah.”       

Une demande de libération sous caution a été immédiatement déposée par son avocat, Umair Ronga. Ce dernier a  qualifié l'arrestation de "choquante" et dénoncé "la fin de l'État de droit" au Cachemire.   

Dégradation de la situation   

“Travailler comme journaliste n’a jamais été facile au Cachemire, mais cela devient plus difficile de jour en jour.”, confiait déjà Fahad Shah à RSF en 2017. Depuis plusieurs années, le journaliste indépendant fait l’objet d’agressions et de convocations successives par la police à des fins d’intimidation et pour qu’il révèle les sources de ses articles.  

La pression sur l’ensemble des journalistes cachemiris n’a fait que croître depuis l'annulation par New Delhi de l'autonomie partielle du territoire en août 2019. Le début de l’année 2022 a été marqué par plusieurs violations du droit à l’information par les autorités locales.   

Un autre journaliste du The Kashmir Walla, Sajad Gul a été arrêté peu avant la fermeture du Kashmir Press Cachemire (KPC) par le gouvernement indien. Fahad Sha avait alors estimé que cette arrestation faisait partie ““d'une stratégie qui consiste à empêcher les journalistes de couvrir des incidents que le gouvernement juge problématiques”.   

L’Inde se situe à la 142e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2021 par RSF.

Publié le
Updated on 23.02.2022