Vingt-sept journalistes arrêtés en un an. Les organisations Journaliste en danger et Reporters sans frontières font le point sur la situation de la liberté de la presse dans le pays depuis la prise de fonction du chef de l'Etat congolais.
Un an après l'investiture de Joseph Kabila, le 26 janvier 2001 à Kinshasa, les organisations Journaliste en danger et Reporters sans frontières font le point sur la situation de la liberté de la presse en République démocratique du Congo. Depuis la prise de fonction du chef de l'Etat congolais, vingt-sept journalistes ont été arrêtés par les forces de l'ordre. Si ce chiffre a relativement diminué par rapport aux années de règne de Laurent-Désiré Kabila, il reste néanmoins l'un des plus importants du continent africain. En 2001, plusieurs journalistes ont été agressés ou menacés, des médias ont été perquisitionnés, du matériel saisi et des vendeurs de journaux arrêtés. Les journalistes congolais restent très menacés et exposés aux représailles du pouvoir et des nombreux services de sécurité qui agissent dans le pays. Lors de son investiture, Joseph Kabila avait prononcé un discours en faveur des droits de l'homme et de la démocratie, et entrepris une tournée des capitales occidentales. Douze mois plus tard, force est de constater que le président de la République n'a pas respecté ses engagements et a envoyé des journalistes en prison. Il est toujours l'un des prédateurs de la liberté de la presse dans le monde.
A plusieurs reprises, au printemps 2001, la nouvelle équipe dirigeante a affirmé que le chef de l'Etat ne contrôlait pas encore totalement la situation et que les services de sécurité, notamment, échappaient à son autorité. Un an après, cet argument ne tient plus. Le gouvernement a été remanié et le Président s'est entouré de nouvelles personnalités, plus proches de lui. Selon de nombreux observateurs locaux, les différents services de sécurité continuent à sévir dans la plus totale impunité, comme par le passé. Joseph Kabila avait également ordonné la fermeture de tous les centres de détention qui ne dépendaient pas des parquets de la République. Or, douze mois plus tard, cette mesure est restée lettre morte. La plupart des cachots visés sont toujours opérationnels et plusieurs journalistes ont été détenus dans des cachots ne relevant pas des parquets de la République tels que ceux des Services spéciaux de la Police, de la Détection des activités militaires anti-patrie (Demiap) et de l'Agence nationale de renseignements (ANR).
L'entourage du Président est parfois directement à l'origine de l'arrestation de journalistes. A titre d'exemple, Joachim Diana Gikupa, directeur de publication du quotidien progouvernemental L'Avenir, a été arrêté, le 14 juin 2001, par les services de l'ANR. Le quotidien avait publié un article intitulé : "J. Kabila torpillé par son entourage ?" L'article était accompagné d'un fac-similé d'une lettre signée par le professeur Théophile Bemba Fundu, directeur de cabinet du président Joseph Kabila. Dans ladite correspondance adressée à "Monsieur l'Administrateur", non autrement identifié, l'auteur demandait au destinataire de tout faire en vue d'empêcher la conférence de presse du chef d'un parti politique.
Plus récemment, le 31 décembre 2001, Guy Kasongo Kilembwe et Vicky Bolingola, respectivement rédacteur en chef et secrétaire de rédaction du journal satirique Pot-Pourri, ont été arrêtés à Kinshasa par des agents des Services spéciaux de la police nationale congolaise. Ils ont été accusés "d'atteinte à la sûreté de l'Etat" et "offense à la personne du chef de l'Etat". Le même jour, Pot-Pourri avait publié un article intitulé "A cause de l'incapacité et de l'incompétence des dirigeants actuels… 2002 : la faim continue". Le journal y affirmait : "une grave morosité plane sur les fêtes de fin d'année (…) Pendant ce temps, Kabila II, général-major d'opérette, parachuté chef de l'Etat, promet d'opérer des miracles au Katanga. Comme Kabila Ier". Les journalistes ont passé plusieurs jours en prison.
Un point positif tout de même dans ce bilan : la restitution, en octobre 2001, des chaînes de radios et de télévisions privées RTKM et Canal Kin à leurs propriétaires. Un an plus tôt, le ministre de l'Information de l'époque, Dominique Sakombi, avait décidé de nationaliser ces médias privés. Cependant, ces médias ont été saccagés par l'Etat et les propriétaires de la RTKM et de Canal Kin demandent toujours la restitution du matériel confisqué et la réparation des appareils endommagés.