Reporters sans frontières appelle à nouveau le gouvernement à la vigilance et au dialogue après deux attaques commises à La Paz, les 28 et 29 octobre 2008, contre des journalistes du secteur privé par des militants du Comité civique populaire. L'organisation demande que soit suivie d'effets la condamnation de ces actes par le vice-président Alvaro García Linera.
Reporters sans frontières exprime son soulagement après l'assignation à résidence prononcée le 14 novembre 2008, à l'encontre d'Adolfo Cerrudo. Le 29 octobre, ce leader du Comité civique populaire, un groupe radical progouvernemental, avait participé, avec 200 autres militants, à l'agression d'une douzaine de journalistes présents devant la prison San Pedro de La Paz, où est détenu l'ancien préfet d'opposition, Leopoldo Fernández, arrêté et incarcéré après un massacre commis le 11 septembre dans le Pando (Nord). Mis en examen pour menaces de viol à l'encontre d'une journaliste du quotidien privé La Razón, Adolfo Cerrudo avait pourtant été interdit par décision de justice de s'approcher des membres des médias pour pouvoir bénéficier d'une liberté conditionnelle.
À la suite d'une audience où un rapport d'évaluation psychologique a révélé les “tendances violentes et agressives” du prévenu, Adolfo Cerrudo a donc été interdit de quitter son lieu de résidence, hors de ses comparutions judiciaires. Son domicile a été placé sous surveillance policière depuis le 17 novembre 2008, après que celui-ci avait contrevenu à son assignation dès le lendemain du jugement. “Ces mesures préventives sont une protection nécessaire pour la sécurité de tous les journalistes, et nous espérons qu'elles seront suivies d'une condamnation d'Adolfo Cerrudo, afin d'envoyer un signal clair aux activistes radicaux - qu'ils se revendiquent progouvernementaux ou d'opposition - qui prennent régulièrement pour cibles, en toute impunité, les membres des médias”, a déclaré l'organisation.
--------------------------
31.10 - Attaques de militants progouvernementaux contre la presse : "La sécurité des journalistes doit être prioritaire", selon Reporters sans frontières
Reporters sans frontières appelle le gouvernement et les autorités judiciaires à réagir après deux séries d'agressions commises par des militants du Comité civique populaire - un groupe radical se revendiquant progouvernemental - contre des journalistes du secteur privé, les 28 et 29 octobre 2008 à La Paz. Le vice-président, Alvaro García Linera, a condamné ces actes, le 30 octobre, et promis une enquête.
“Dans une tribune publiée le 21 octobre dans les quotidiens nationaux La Razón et La Prensa, Reporters sans frontières a dénoncé sans réserve le racisme et les appels au meurtre contre le président Evo Morales proférés par des opposants radicaux sur certains médias privés. La justice doit également s'appliquer à des activistes se réclamant du gouvernement, qui incitent à la haine contre des journalistes. La passivité dont la police a fait preuve lors de ces deux attaques est inadmissible et l'enquête promise par le vice-président doit faire la lumière sur ce point. De même, il est inadmissible que le chef de file du Comité civique populaire, Adolfo Cerrudo, plusieurs fois inculpé pour des attaques contre des journalistes, ait recommencé ses agissements et violé les obligations du contrôle judiciaire auquel il était soumis. Nous espérons qu'il sera renvoyé en prison et jugé, tout comme nous le souhaitons pour les membres de groupes autonomistes auteurs d'attentats contre des médias publics. Dans la logique des accords politiques passés entre le gouvernement et les principaux partis d'opposition dans la perspective du référendum constitutionnel du 25 janvier 2009, nous demandons également que le président Evo Morales et ses ministres concernés prennent des mesures concrètes de sécurité en faveur des médias et dialoguent au plus vite avec les représentants de la profession”, a déclaré Reporters sans frontières.
Le 29 octobre, quelque 200 militants du Comité civique populaire ont agressé une douzaine de journalistes présents devant la prison San Pedro, au moment où des délégués d'une commission de l'Union des nations sud-américaines (Unasur) - chargés d'enquêter sur le massacre de quinze paysans indigènes, le 11 septembre -, venaient y interroger l'ancien gouverneur du département du Pando (Nord-Ouest), Leopoldo Fernández, inculpé et détenu dans cette affaire pour “génocide”. Des militantes du collectif des “Ponchos rouges” ont d'abord frappé les journalistes à coups de lanières de cuir. D'après le témoignage recueilli par Reporters sans frontières auprès de María Luisa Callejas, du quotidien La Prensa, elle-même agressée, l'attaque a pris de l'ampleur lorsque les journalistes de télévision - ATB, Red Uno - ont installé leurs équipements. “Nous allons vous dégager à coups de pied si vous ne partez pas”, ont crié les agresseurs, parmi lesquels un homme rapidement identifié comme étant Adolfo Cerrudo. “A aucun moment de l'agression la police n'est intervenue pour disperser les agresseurs. Ils se sont contentés de nous maintenir à l'écart”, a indiqué María Luisa Callejas. Cette précaution n'a pas suffi. Les manifestants se sont ensuite rués vers les journalistes. Jonnatan Condori, de Radio Erbol (station affiliée à l'Église catholique) et Javier Alanota, de la chaîne ATB, ont été roués de coups.
La veille, au même endroit, des militants du Comité civique populaire, emmenés par Edgar Mora, s'en sont pris violemment à quatre journalistes venus couvrir leur protestation contre un éventuel transfert de l'ancien gouverneur du Pando vers Sucre. Roxana Lizárraga, et le cameraman Juan Carlos Vera, de la chaîne de télévision privée Unitel, Nicolás Sanabria, de la station privée Radio Fides, et Gustavo Arévalo, de la chaîne privée ATB - ont été agressés au motif d'”être payés par Leopoldo Fernández”. Certains journalistes ont dû interrompre leur retransmission en direct.
Déjà mis en cause dans plusieurs agressions contre des médias à La Paz (lire le communiqué du 25 juillet 2008), Adolfo Cerrudo avait menacé de viol, au mois de mars, une journaliste du quotidien La Razón. Assigné à résidence par la juge Virginia Crespo, il avait été remis en liberté conditionnelle, le 23 juillet, moyennant l'engagement écrit de ne plus s'en prendre aux médias.
La Bolivie se classe au 115e rang (sur 173 pays) du classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières en 2008, soit une perte de 47 places par rapport à l'année précédente. La multiplication des agressions contre les médias et la polarisation de ces derniers, générées par dix mois de crise politique, expliquent cette forte rétrogradation.