Sept journalistes de la ville des Gonaïves (Nord), qui se cachaient depuis le 21 novembre, ont trouvé refuge à Port-au-Prince. Tous ont reçu des menaces de l'Armée Cannibale, une milice armée proche du président Aristide qui "sème la terreur et impose sa loi à tous" dans la ville.
Le 30 novembre, Esdras Mondelus, directeur de Radio Etincelle, Henry Fleurimond, de Radio Kiskeya, Renais Noël Jeune, Jean Niton Guérino, Gédéon Présandieu, reporters de Radio Etincelle (de gauche à droite sur la photo, cr. AP), René Josué, de Signal FM, et Jean-Robert François, de Radio Métropole, ont trouvé refuge à Port-au-Prince.
Les sept journalistes de la ville des Gonaïves se cachaient depuis le 21 novembre. D'abord réfugiés au siège de l'évêché de la ville, ils ont dû le quitter le 28 novembre à la demande des ecclésiastiques qui craignaient une attaque. Le lendemain, l'hôtel des Gonaïves dans lequel ils avaient trouvé asile était la cible de tirs de l'organisation Armée Cannibale, une organisation armée proche de Fanmi Lavalas (au pouvoir). Ils ont alors été évacués dans la ville du Cap-Haïtien d'où, le lendemain, ils ont pris un avion pour Port-au-Prince avec le soutien de l'Association des journalistes haïtiens (AJH).
Les sept journalistes sont menacés par Amiot Métayer, le chef de l'Armée Cannibale, pour avoir couvert des manifestations demandant le départ du président Aristide. Poursuivi pour des exactions commises contre l'opposition en décembre 2001, Amiot Métayer s'était évadé de prison en août 2002. Le gouvernement affirme qu'il n'a pas été arrêté pour éviter un bain de sang. Mais selon un document daté du 29 novembre de l'organisation de défense des droits de l'homme National Coalition for Haïtian Rights (NCHR), "l'Armée Cannibale sème la terreur et impose sa loi à tous (aux Gonaïves)". "La police est pratiquement inexistante dans cette importante ville de la République", a souligné la NCHR, qui affirme par ailleurs que deux autres journalistes de la ville, Frantz Renel Lebrun, de Radio Ibo, et Eric Julien, de Caraïbes FM, ont été contraints de se cacher.
"Le gouvernement utilise des bandes armées pour persécuter les journalistes", a expliqué Esdras Mondelus dans une interview à l'agence Associated Press (AP). "Les voyous des Gonaïves sont de mèche avec ceux de Port-au-Prince. Ils reçoivent leurs ordres d'Aristide", a-t-il ajouté pour justifier ses craintes persistantes pour sa sécurité. Il a par ailleurs confié à Reporters sans frontières qu'après son départ et celui de ses confrères des Gonaïves, "il n'existe plus de presse crédible dans cette ville. En dehors de Radio Etincelle, les autres stations ont une programmation uniquement musicale. Et Radio Indépendante, une radio proche de Fanmi Lavalas, a suspendu ses bulletins d'information."
AP signale par ailleurs que la station Radio Maxima, basée au Cap Haïtien, a suspendu ses programmes d'information le 1er décembre, après que ses journalistes avaient reçu des menaces de partisans du président Aristide lors d'une manifestation progouvernementale. Selon l'AJH, 64 journalistes ont été menacés en 2002, 62 par le gouvernement et deux par l'opposition.
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26.11.2002 - Une radio incendiée et neuf journalistes menacés dans le nord du pays
Reporters sans frontières a exprimé sa vive inquiétude à la suite des agressions contre la presse survenues ces derniers jours en Haïti. Dans le nord du pays, une station de radio a été partiellement incendiée et neuf journalistes ont été menacés, dont sept sont obligés de se cacher. Reporters sans frontières a demandé au président Jean-Bertrand Aristide (photo) de condamner ces agressions et actes d'intimidation attribués à ses supporters.
"Nous vous enjoignons de donner des consignes claires à vos partisans afin qu'ils cessent leurs persécutions envers les médias", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. Par ailleurs, ce dernier a renouvelé son appel au Président à donner un coup d'arrêt à l'impunité en ordonnant l'ouverture d'enquêtes qui conduisent à la sanction des auteurs des agressions et menaces contre les journalistes.
Selon les informations recueillies par Reporters sans frontières, les locaux de Radio Etincelle aux Gonaïves (155 kilomètres au nord-ouest de Port-au-Prince) ont été incendiés dans la soirée du 24 novembre 2002. Des cocktails Molotov lancés par des inconnus seraient à l'origine de l'incendie qui a détruit une partie de la station et de son matériel.
Le directeur de Radio Etincelle, Esdras Mondélus, avait reçu des menaces de mort quelques jours plus tôt par téléphone, suite à la couverture donnée à une manifestation de l'opposition. Il avait été obligé de suspendre les programmes de la radio les 21 et 22 novembre. Les menaces provenaient de membres d'organisations populaires proches de Fanmi Lavalas (au pouvoir).
Dans la même ville, sept journalistes de la presse privée, dont Jean Robert François, correspondant de Radio Metropole, Fleurimont Henry, correspondant de Radio Kiskéya, Frantz Rénel Lebrun, correspondant de Radio Ibo, Esdras Mondélus, ainsi que trois de leurs confrères, ont été menacés de mort par ces mêmes organisations. Les sept professionnels de l'information ont été contraints de se cacher.
Quelques jours plus tôt, au Cap-Haïtien (260 km au nord de Port-au-Prince), deux journalistes de Radio Maxima, Péguy Jean et Joël Joseph avaient également été agressés par des membres d'organisations populaires se réclamant du gouvernement Lavalas. Ces derniers leur reprochaient leur couverture de la manifestation de l'opposition du dimanche 17 novembre.
Le climat en Haitï est très tendu. Le 17 novembre, deux manifestations se sont déroulées au Cap-Haitïen (deuxième ville du pays). L'une demandait le départ du président Aristide et regroupait plus de 20 000 participants selon les journalistes présents sur place, alors que l'autre soutenait le gouvernement. De nouvelles manifestations hostiles au gouvernement se sont déroulées dans d'autres villes de province. Ces marches ont été suivies de manifestations progouvernementales à Port-au-Prince. Selon l'agence Associated Press, six personnes ont été blessées par balles le 25 novembre lors de nouvelles manifestations pro-gouvernementales et de l'opposition se déroulant à Port-au-Prince et aux Gonaïves.