Reporters sans frontières appelle les députés et sénateurs "à prendre leurs responsabilités pour prémunir les citoyens d'un texte qui comporte plusieurs dispositions allant à l'encontre des fondements même de notre démocratie". L'organisation dénonce principalement les entraves à la libre circulation de l'information sur Internet et la remise en cause du secret des échanges professionnels et privés contenues dans cette loi.
" L'adoption, ce jour, de la LOPSI, la Loi d'orientation et de
programmation sur la sécurité intérieure, m'incite à vous demander de
former un recours devant le Conseil constitutionnel afin que cette
institution de la République juge de la constitutionnalité de ce
texte sensible ", explique Robert Ménard, secrétaire général de
Reporters sans frontières, dans une lettre adressée à l'ensemble des
députés et sénateurs.
Adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 17 juillet
2002, et par le Sénat le 31 juillet, la LOPSI, le texte présenté par
Nicolas Sarkozy, Ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure
et des Libertés locales, n'attend plus désormais que la ratification
du chef de l'Etat pour entrer effectivement en vigueur dans les
prochaines semaines.
" Notre organisation de défense de la liberté de la presse et de la
liberté d'expression s'alarme de la nouvelle dérive sécuritaire et du
recul des libertés numériques générés par cette de loi et dénonce les
entraves à la libre circulation de l'information sur Internet et la
remise en cause du secret des échanges professionnels et privés des
citoyens " , renchérit Robert Ménard.
" Le 29 juillet, dans un courrier adressé à M. Nicolas Sarkozy, j'ai
répercuté nos vives inquiétudes en ces termes : " Nous déplorons le
climat de surveillance généralisé instauré par les nouvelles mesures
soumises au législateur ; le climat de suspicion globale alimenté par
le fait que, désormais, chaque citoyen est considéré comme un
délinquant ou un terroriste potentiel et les atteintes graves portées
à la liberté d'expression et à la confidentialité des correspondances
professionnelles et privées. Notre organisation s'interroge
particulièrement sur la capacité à garantir le secret des sources des
journalistes, dans la mesure où les données relatives aux connexions
à Internet, aux envois et réceptions de e-mails (logs de connexions
au Réseau) pourront être réquisitionnées et examinées avec une
facilité déconcertante par les policiers et les gendarmes."
Le secrétaire général de Reporters sans frontière précise aussi qu'il
a interpellé M. Michel Gentot, président de la Commission nationale
de l'Informatique et des Libertés (CNIL), à propos de son " silence
sur le sujet et de l'absence d'initiative de sa part à même de porter
le débat sur la place publique et d'envoyer (…) le signal que la
libre circulation de l'information et la confidentialité des échanges
sur Internet sont des libertés numériques fondamentales qui doivent
être préservées et protégées ".
" En tant que membre de la Représentation nationale, élu du peuple,
il est de votre responsabilité de prémunir les citoyens d'un texte
qui comporte, à notre avis, plusieurs dispositions allant à
l'encontre des fondements même de notre démocratie ", écrit Reporters
sans frontières aux parlementaires. " Votre concours est d'autant
plus important qu'en son temps, lors du vote de la Loi sur la
sécurité quotidienne (LSQ), en novembre 2001, l'absence de saisine a
posteriori du Conseil constitutionnel de la part des parlementaires a
profondément choqué la société civile et l'opinion publique et
quelque peu entamé le crédit des élus de la Nation. "
" Votre démarche, individuelle ou collective, au sein du groupe
parlementaire auquel vous appartenez, ne pourra qu'honorer votre
fonction et les institutions de la Nation ", conclut Robert Ménard.