Cisjordanie : la répression des journalistes palestiniens se poursuit dans l'ombre de la guerre de Gaza

En Cisjordanie, près d’une quinzaine de journalistes palestiniens sont détenus par les forces de sécurité israéliennes depuis le 15 octobre. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une répression accrue constituant une grave entrave à la liberté de la presse et exige la libération immédiate de ces professionnels de l’information.

Les pressions contre les journalistes s’intensifient en Cisjordanie. Sur ce territoire, dirigé par l’Autorité palestinienne, au moins 14 journalistes palestiniens, arrêtés par les forces israéliennes d’occupation depuis le début de la guerre, sont toujours emprisonnés.

Les reporters ont été arrêtés principalement à leur domicile et lors de raids ciblés, entre le 15 octobre et le 8 novembre. Cela a notamment été le cas du photojournaliste du site d’information J-Media Moaz Amarna. Le 16 octobre, des soldats se sont présentés chez lui, dans le camp de réfugiés de Dheisheh, au sud de Bethléem. Lorsque Moaz Amarna leur a signifié qu’il était journaliste, les soldats ont téléphoné à leur supérieur qui a immédiatement ordonné son arrestation pour "incitation à la violence", selon l'organisation de défense de la liberté de la presse palestinienne Mada Center.  

Transféré à la prison de Megiddo en Israël, le journaliste a été condamné, deux semaines plus tard, à une détention administrative de 6 mois. Selon son avocat, il subit, depuis, des violences quotidiennes de la part de ses geôliers, qui le privent également de soins médicaux de base. Le reporter souffre notamment de séquelles de graves blessures au crâne causées par un tir de l’armée israélienne alors qu’il couvrait un affrontement armé près de Jérusalem en 2019. Il avait, alors, également perdu un œil. 

Le directeur de la société de production Space Media, qui est également en charge du service presse de la municipalité d'Hébron, a, lui, été interpellé à son domicile du sud de la ville vers 1 h du matin, le 20 octobre dernier. Thaer Ziyad Al-Fakhouri, 32 ans, s’est vu encerclé de soldats israéliens, selon son père, tandis que sa femme, ses enfants et le reste de la famille étaient contraints de rester sur un autre palier. Après lui avoir confisqué ses clés et son téléphone, les militaires l’ont embarqué menotté et les yeux bandés, vers une destination gardée secrète.

"RSF dénonce une répression accrue caractérisée par la multiplication des arrestations abusives de la part des forces israéliennes d’occupation en Cisjordanie des journalistes couvrant le débordement de la guerre à Gaza. Nous demandons leur libération immédiate et inconditionnelle, ainsi que l’arrêt des pressions et des menaces qui entravent le travail des reporters palestiniens.

Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF

Aux arrestations de Moaz Ibrahim Ata Amarna et de Thaer Ziyad Al-Fakhouri s’ajoutent celles d’une dizaine de journalistes indépendants ou travaillant pour les médias palestiniens, Palestine Information Center, Alam Falastin, J-Media, Al Hadath et les agences de presse Quds Press et Maan News Agency. Parmi eux figurent Sojoud Assi (journaliste d’Al Hadath), Alaa Hassan al-Rimawi (directeur de J-Media), ou encore Abed al Naser Lahham (photojournaliste de la Maan News Agency) 

Entraves multiformes au droit à l’information

Outre les 14 journalistes toujours détenus, au moins sept autres journalistes indépendants ont été retenus et interrogés quelques heures à des postes de contrôle militaires ou de police avant d’être libérés.  

D’autres professionnels de l’information sont empêchés de couvrir l’actualité en Cisjordanie. Les équipes de J-Media, celles des chaînes de télévision jordanienne (JRTV) et palestinienne (Dafa), ainsi que des journalistes indépendants palestiniens ou internationaux ont notamment été entravés dans leur couverture de manifestations de soutien à Gaza. Certains ont été physiquement agressés, d’autres ont été menacés verbalement ou intimidés, et d’autres encore ont été la cible de bombe sonore par les forces armées. Selon les journalistes sur le terrain, ces violences se sont intensifiées depuis le 7 octobre.

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