Manifestations au Sri Lanka : “Le libre exercice du journalisme est indispensable à une sortie de crise par le haut”

Huit salariés de la chaîne de télévision News First ont été la cible de violences policières délibérées lors des manifestations spectaculaires qui ont secoué Colombo, la capitale, durant le week-end du 9 juillet. Face à ces attaques inacceptables, Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités de l’île à laisser les journalistes travailler en toute indépendance, garantie nécessaire au bon fonctionnement de la démocratie sri-lankaise dans cette période sensible.

Des matraques fondant sur des reporters, des journalistes blessés à la tête arrivant sur des civières à l'hôpital… Ces images, que les téléspectateurs sri-lankais ont pu suivre en direct le week-end dernier, témoignent de l’état erratique de la liberté de la presse au Sri Lanka, en amont de la démission, annoncée pour ce mercredi 13 juillet, du président de la République, Gotabaya Rajapaksa. 

“À l’heure où tout le pays retient son souffle, il est absolument fondamental que les journalistes puissent travailler en toute sécurité et en toute indépendance, afin de garantir un pluralisme des points de vue absolument crucial durant ce moment historique pour le Sri Lanka, prévient le directeur du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. Nous appelons le ministre de l’Intérieur, Dinesh Gunawardena, à veiller à ce que les forces de l’ordre s’abstiennent de toute nouvelle forme de violence à l’égard des reporters qui couvrent les événements actuels. C’est là une condition indispensable à une sortie de crise par le haut.”

Le 9 juillet, alors que la résidence du Premier ministre Ranil Wickremesinghe était envahie par des manifestants et incendiée, une équipe de la chaîne News First, l’un des principaux médias de l’île, est arrivée sur place après en avoir dûment averti les autorités. Mais au moment de passer à l’antenne en direct, la rédactrice Sarasi Peiris et son confrère Judin Sinthujan, le reporter d’images Warun Sampath, ainsi que le journaliste web Janitha Mendis ont tous les quatre été violemment pris à partie et bousculés par des paramilitaires casqués et armés de matraques de la Special Task Force (STF).

Journalistes battus à terre

Comme le prouvent les images tournées à l’occasion, leur commandant, Romesh Liyanage, a ordonné un assaut spécifique contre l’équipe de presse. On y voit très clairement un agent asséner un coup de matraque à Warun Sampath qui, bien que déjà au sol, tient encore sa caméra. Un autre angle de vue montre le journaliste de l’équipe tomber à terre, entouré d’une dizaine d’hommes armés qui le molestent.

Face à l’urgence, quatre autres membres de News First, situés à proximité, se sont alors précipités pour venir en aide à leurs collègues : le présentateur Imesh Sutherland, le correspondant local Banidu Lokuruge, et deux assistants de rédaction, Kalimuttu Chandran et Chanuka Weerakoon, n’ont pourtant rien pu faire, se retrouvant à leur tour visés par des tirs de gaz lacrymogènes et d’une seconde charge lancée par la police. Quatre des journalistes de First News ont dû être transférés à l’hôpital dans la nuit de samedi à dimanche.

Dans un communiqué consulté par RSF, le porte-parole de la police sri-lankaise, Nihal Thalduwa, a annoncé l’ouverture d’une enquête de l’inspection générale de la police contre Romesh Liyanage. Ce lundi 11 juillet, le commandant de la STF a été suspendu avec effet immédiat.

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