Un journaliste gravement blessé et quatre autres menacés de mort par des islamistes
Reporters sans frontières et le Centre pour le développement, le journalisme et la communication du Bangladesh (BCDJC) ont exprimé leur très vive préoccupation suite à la tentative d'assassinat contre le journaliste Belal Chowdhury et les menaces de mort lancées contre quatre autres reporters de la part de militants islamistes de Faridpur.
"Les militants islamistes semblent avoir imposé leur loi à Faridpur. Les journalistes qui tentent de défendre ouvertement le droit à la liberté d'expression sont pourchassés et agressés sans que les autorités réagissent", ont affirmé Robert Ménard et Nayeemul Islam Khan, respectivement secrétaire général de Reporters sans frontières et président du BCDJC, dans une lettre adressée au ministre de l'Intérieur, Altaf Hossain Chowdhury. Reporters sans frontières a demandé au ministre de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser les violences et les menaces des militants islamistes à l'encontre des journalistes. Les deux organisations ont également demandé une réaction rapide de la police de Faridpur pour arrêter les personnes impliquées dans la tentative d'assassinat contre Belal Chowdhury.
Une délégation de Reporters sans frontières, du BCDJC et d'autres organisations de journalistes se rendra à Faridpur les 30 et 31 octobre pour soutenir les reporters locaux et enquêter.
D'après les informations recueillies par les deux organisations, Belal Chowdhury, reporter du journal local Dainik Thikana, a été agressé, dans l'après-midi du 24 août 2002, par cinq individus armés de machettes et de haches dans un marché de la ville de Faridpur (ouest de Dhaka). Belal Chowdhury, sans connaissance, a été conduit à l'hôpital de Faridupur où le médecin a relevé quinze blessures graves, avant d'ordonner son transfert vers un hôpital de Dhaka. L'état du journaliste est toujours préoccupant.
Le frère du journaliste a déposé une plainte auprès de la police de Faridpur, dans laquelle il dénonce trois délinquants locaux. La police n'a pas encore procédé à des arrestations.
Cette attaque fait suite aux menaces de mort lancées par un groupe islamiste Touhidi Janata contre les journalistes qui soutiennent une troupe de théâtre locale persécutée par les intégristes musulmans et les autorités locales.
En effet, les groupes islamistes ont obtenu de l'administration locale l'interdiction de la représentation de la pièce Khatha Krishnakhali par une troupe de théâtre de Faridpur. Ils avaient jugé l'œuvre "blasphématoire". Suite aux manifestations de rue des islamistes, la police a arrêté l'auteur et le metteur en scène de la pièce. Les comédiens se cachent de peur d'êtres interpellés. S'ils sont inculpés de "blasphème", ils risquent la peine de mort.
A partir du 23 août, les islamistes s'en sont pris aux correspondants des quotidiens nationaux Janakantha, Bhorer Kagoj, Prothom Alo et Ajker Kagoj qui avaient rapporté les événements et soutenu la troupe de théâtre. De même, Belal Chowdhury avait dénoncé dans son journal local les demandes des leaders islamistes de "pendre" les membres de la troupe de théâtre et les journalistes qui les soutiennent.
Prabir Shikder, correspondant du Janakantha à Faridpur, a déposé une plainte au nom des journalistes menacés. Déjà, en avril 2001, Prabir Shikder avait échappé à une tentative d'assassinat dans le centre-ville de Faridpur. Les médecins avaient dû l'amputer de la jambe droite touchée par une balle. Le journaliste avait écrit quelques jours auparavant un article mettant en cause le passé de "criminel de guerre" de l'homme d'affaires Musa-bin-Shamsher. L'enquête de la police était partiale et n'a jamais abouti à un procès.