Libye : RSF appelle à la libération immédiate du journaliste Salhine Zerouali, jugé par un tribunal militaire

Accusé de collaborer avec des médias jugés hostiles par les autorités, le journaliste Salhine Zerouali est détenu depuis mai 2024 et, après plusieurs reports, a comparu pour la première fois devant un tribunal militaire à Benghazi le 13 mars 2025. Reporters sans frontières (RSF) appelle à sa libération immédiate et à la fin d’un procès opaque et inique.
Cela fait plus de dix mois que Salhine Zerouali est en détention. Le journaliste, qui collabore avec plusieurs médias, dont l’agence d’informations Al Ghaïma à Ajdabiya dans l’est de la Libye, fait face à un procès devant la justice militaire se déroulant sans calendrier précis et dans une opacité totale, ses avocats n’ayant qu’un accès restreint au dossier d’accusation. Salhine Zerouali a comparu pour la première fois devant le tribunal militaire de Benghazi le 13 mars 2025. Bien que plusieurs charges aient été abandonnées par le procureur militaire, telles que le port d'armes et l’appartenance à des groupes terroristes, il reste poursuivi en raison de son travail journalistique avec des médias jugés hostiles par les autorités.
“La traduction des journalistes devant les tribunaux militaires en Libye contrevient aux engagements internationaux du pays et les prive du droit à un procès équitable. Les autorités doivent protéger le droit des journalistes et ainsi le droit à l’information. Nous les appelons à mettre fin à cette procédure inique et à libérer immédiatement Salhine Zerouali. Ces décisions constitueraient un signal positif pour les journalistes, qui travaillent aujourd’hui dans un climat de peur dans le pays.
L'arrestation violente de Salhine Zerouali s'est déroulée le 15 mai 2024. Ce jour-là, alors qu'il était en voiture avec son fils âgé de neuf ans, il a été intercepté à Ajdabiya, par un véhicule civil appartenant aux forces de sécurité. Des hommes masqués l'ont agressé physiquement devant son fils avant de le conduire dans un centre de détention de cette ville de l'est de la Libye. Il a été transféré à Benghazi quelques jours plus tard, où il est actuellement détenu dans une prison militaire.
Des proches du journaliste ont confié à RSF leur inquiétude concernant le jugement du journaliste sans garantie d’un procès équitable devant le tribunal militaire de Benghazi. Ils ont par ailleurs souligné que les accusations portées contre lui au départ ont été abandonnées “car il n’a fait, tout simplement, que son travail de journaliste et n’avait l’intention de porter atteinte à quiconque”. À leurs yeux, “son arrestation à deux reprises en 2019 en raison de ses opinions reflète un schéma récurrent de ciblage à son égard”.
En 2020, les journalistes Abdel Salam al-Turki et Ismaïl Abou Zriba el-Zouei ont également été traduits devant ce même tribunal, victimes de poursuites judiciaires à cause de leurs collaborations avec des médias que les autorités considéraient comme opposés à leur pouvoir.
Les poursuites engagées contre Salhine Zerouali par le tribunal militaire de Benghazi s’inscrivent dans un climat particulièrement tendu et parfois même violent à l'égard des journalistes et des médias en Libye. En février 2025, RSF a déjà pointé la persistance de la forte répression visant les professionnels des médias, avec de nombreux cas de harcèlement, de détentions arbitraires et de menaces.
La Libye occupe la 143e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2024.