Le secret des sources menacé
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Sept journalistes ont été convoqués par la justice au cours des dernières semaines et interrogés sur leurs sources d'information. "Lorsque les journalistes sont contraints de révéler leurs sources, plus personne ne leur confie d'informations. C'est alors le droit de la société à être informée qui est remis en cause", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, dans une lettre adressée au président Vicente Fox Quesada. "Le principe de la protection des sources est la seule garantie d'un journalisme d'enquête et d'investigation indépendant, indispensable à la transparence de la vie publique", a-t-il ajouté.
L'organisation s'est par ailleurs dite "choquée" des propos tenus par le Président, le 15 novembre dernier, lors d'une réunion organisée à Paris avec différentes organisations de défense des droits de l'homme, à laquelle participait Reporters sans frontières. Le président Fox avait notamment déclaré qu'il n'était pas question que les journalistes qui publieraient des informations obtenues illégalement ne soient pas poursuivis. L'organisation a demandé au président Fox l'inclusion dans le code de procédure pénale mexicain d'un article protégeant le secret des sources.
Le 3 décembre 2002, Daniel Moreno, journaliste et directeur de l'information du quotidien El Universal, a été cité à comparaître à Mexico par la justice fédérale afin de révéler les sources d'un article paru le 16 juin 2002. Le journaliste a refusé en mettant en avant le droit de protéger ses sources. L'article en question traitait d'un scandale de corruption au sein de la compagnie pétrolière publique Petroleos Mexicanos (Pemex). A la suite de cet article, les autorités ont décidé de lancer une enquête précisant que certaines informations de l'article, classées secrètes, n'avaient pu être obtenues que grâce à des fuites non autorisées. Le procureur général a expliqué le 3 décembre, lors d'une conférence de presse, que son but n'était pas de s'attaquer aux journalistes mais de prendre des mesures contre les fonctionnaires qui divulguent auprès des médias des informations classées secrètes par la loi.
Le 18 novembre dernier, à Mexico, Enrique Méndez, Gustavo Castillo, Rubén Villalpando, Andrea Becerril, Ciro Pérez et Roberto Garduño avaient été cités à comparaître suite à plusieurs articles parus en janvier 2002 au sujet des mêmes affaires de corruption. Les six journalistes, du quotidien La Jornada, avaient refusé de révéler leurs sources malgré les pressions du procureur général de la République. Les reporters avaient ensuite porté plainte auprès de la Commission nationale des droits de l'homme (CNDH).
A la suite de cette plainte, la CNDH, par le biais de son président José Luis Soberanes, avait émis un communiqué dans lequel il affirmait que "comme les médecins ou les avocats, c'est un devoir professionnel et une obligation pour un journaliste de refuser de révéler ses sources". Il avait souligné que la répétition de ces citations "(s'était) convertie en un exercice d'intimidation".
Reporters sans frontières a demandé au président Fox l'inclusion dans le code de procédure pénale mexicain de l'article suivant :
"Chaque journaliste a droit au respect de la confidentialité sur l'origine de ses informations. Tout journaliste entendu à quelque titre que ce soit sur des informations recueillies dans l'exercice de son activité pourra ne pas en révéler l'origine et nul ne pourra prendre de dispositions afin de l'y contraindre."
Publié le
Updated on
20.01.2016