Le blogueur Nguyen Lan Thang condamné à six ans ferme pour “propagande contre l’Etat”
Six ans de prison ferme et deux ans avec sursis, c’est la condamnation prononcée à l’encontre du blogueur Nguyen Lan Thang par un tribunal de Hanoï pour “propagande anti-étatique”. Dénonçant un procès kafkaïen, RSF demande sa libération immédiate.
Après neuf mois de détention provisoire, le blogueur indépendant Nguyen Lan Thang a été condamné mercredi 12 avril à huit de prison - dont deux années assorties d’un sursis avec mise à l’épreuve - pour “propagande anti-étatique” par un tribunal de Hanoï. Alors que l’article 25 du code de procédure pénale vietnamien prévoit qu’un procès peut se tenir à huis clos uniquement s’il s’agit de protéger les secrets d’Etat, les coutumes et traditions de la nation, les mineurs ou la vie privée, seuls l’épouse de Nguyen Lan Thang et ses avocats ont été autorisés à entrer dans la salle d’audience.
“ Avec un procès qui ne respecte, de toute évidence, aucune garantie de procédure, il est clair que le régime communiste vietnamien cherche à faire taire un de ses plus éminents critiques, violant sans vergogne l’article 25 de la Constitution, qui garantit la liberté de la presse et la liberté d’expression. RSF demande la libération immédiate du blogueur Nguyen Lan Thang et l’abandon de toutes les charges qui pèsent contre lui.
Contributeur régulier du blog de la radio états-unienne Radio Free Asia, il est accusé d’avoir “diffamé le parti et l’Etat” en accordant douze entretiens au service vietnamien de la BBC relatifs au contexte politique du pays et en publiant des articles critiques du gouvernement sur ses réseaux sociaux.
Il lui est aussi reproché de détenir des livres interdits, dont deux écrits par la journaliste Pham Doan Trang, condamnée pour “propagande contre l’Etat” en décembre 2021.
Détention abusive
Nguyen Lan Than a d’abord été arrêté le 5 juillet dernier par la cellule d'investigation de la Police de Hanoï pour "fabrication, stockage, distribution ou diffusion d'informations, de documents et d'objets contre l’Etat", en vertu du tristement célèbre article 117 du code pénal de 2015. Il s’agit d’une disposition fourre-tout régulièrement utilisée pour réduire au silence toute voix publique qui ose dévier de la propagande de l’actuelle direction du Parti communiste.
Le blogueur, fervent défenseur des droits humains et critique envers toutes violations à leur encontre par le régime, était détenu au secret, n’ayant pu rencontrer son avocat pour la première fois que le 16 février dernier. Ses demandes d'accéder à son dossier judiciaire ainsi qu’à du papier et un stylo pour préparer sa défense sont restées lettre morte. Il avait également requis l'autorisation d'interroger un expert du département de l'information et de la communication de Hanoi avant ou pendant le procès, sans succès.
Cible régulière du pouvoir
Nguyen Lan Thang a rédigé 130 posts entre 2013 et 2022, couvrant les enjeux sociopolitiques du pays (liberté, démocratie, droits humains). Dans l'un de ses derniers articles, le blogueur dénonce les violations de la liberté d'expression et des droits humains par le gouvernement vietnamien. Il a aussi documenté plusieurs mouvements sociaux survenus dans le pays. Au cours de la dernière décennie, il a été arrêté à maintes reprises, sa résidence a été placée sous surveillance et les autorités lui ont interdit de quitter le territoire.
Blogueurs et journalistes indépendants sont régulièrement la cible du pouvoir car ils représentent les seules sources d’information libre dans un pays où la presse est entièrement aux ordres du Parti communiste du Vietnam (PCV), au pouvoir depuis 1975. Le 30 août dernier, le journaliste indépendant Le Anh Hung, a été condamné à cinq ans de réclusion criminelle le 30 août par un tribunal de Hanoï.