La Colombie a décidé de se prévaloir de l'article 124 du statut de la CPI, adopté à l'initiative de la France, qui exclut les crimes de guerre de la compétence de la Cour. "Alors que les assassinats de journalistes sont encouragés par l'incapacité de la justice colombienne à en punir les auteurs, cette mesure prive la presse d'un recours international précieux", ont souligné Reporters sans frontières et le réseau Damocles.
3.09. 2002 - Le gouvernement maintient son adhésion à l'article 124
Luis Carlos Restrepo, haut commissaire pour la paix, a annoncé que le gouvernement colombien d'Alvaro Uribe entendait maintenir son adhésion à l'article 124 du Traité de Rome. "C'est une porte ouverte dans le cadre du processus de paix (…) cela ne signifie pas que les crimes qui se commettent soient couverts par l'impunité", a expliqué le haut-fonctionnaire.
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2.09.2002 - La Colombie suit le mauvais exemple de la France
Le 5 août 2002, la Colombie devenait le 77e Etat à ratifier le Statut de Rome, le traité portant création de la Cour pénale internationale (CPI). Moins d'un mois après cet engagement, la Colombie décide de se prévaloir de l'article 124 du statut de la CPI. Ce dernier, adopté à l'initiative de la France, exclut les crimes de guerre de la compétence de la Cour, pour les sept prochaines années.
Le réseau Damoclès, organisation de lutte contre l'impunité, et Reporters sans frontières déplorent la décision de la Colombie, au moment où le conflit se durcit dans ce pays, le plus dangereux du continent pour les professionnels de l'information avec une quarantaine de journalistes tués au cours des dix dernières années.
"Alors que les assassinats de journalistes sont encouragés par l'incapacité de la justice colombienne à en punir les auteurs, cette mesure prive la presse d'un recours international précieux", ont souligné Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, et Jean-Pierre Getti, vice-président du réseau Damoclès. Les deux organisations demandent au président Alvaro Uribe Vélez (photo) de revenir sur cette décision.
Dans son édition du 1er septembre, le quotidien colombien El Tiempo a révélé que le gouvernement de l'ancien président Andrés Pastrana, en concertation avec son successeur, l'actuel président Alvaro Uribe Vélez, s'était prévalu de l'article 124 de la CPI à l'occasion de la ratification du Statut de Rome le 5 août dernier. Cet article permet à tout Etat partie de déclarer la Cour incompétente pour les crimes de guerre commis sur son territoire ou par un de ses ressortissants, pour une période de sept ans après l'entrée en vigueur de la CPI.
Le réseau Damoclès et Reporters sans frontières rappellent que cet article a été introduit dans le texte du Statut de Rome à l'initiative de la France qui jugeait certaines dispositions du Statut trop peu protectrices de ses ressortissants.
Adoptée par la Colombie, cette décision a de graves conséquences sur la lutte contre l'impunité dont bénéficient les assassins de journalistes. Seront notamment exclus de la compétence de la CPI les prises d'otages ainsi que les attaques contre la population civile, à laquelle les journalistes sont assimilés.
Une quarantaine de professionnels de la presse ont été tués en Colombie au cours des dix dernières années, dont une quinzaine alors qu'ils couvraient le conflit entre l'armée et les groupes extrémistes, paramilitaires d'extrême droite et guérillas communistes. Au total, les crimes de guerre représentent plus de la moitié des crimes commis dans ce pays.
La CPI, établie par le traité de Rome, est le premier tribunal international permanent chargé d'enquêter et de juger les violations massives du droit international humanitaire et des droits de l'homme. Elle est compétente pour examiner les crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale : le crime de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre. La CPI est entrée en vigueur le 1er juillet 2002.