Hong Kong : Jimmy Lai plaide non coupable dans un procès dont le caractère arbitraire est démontré par les preuves invoquées
Le 2 janvier, Jimmy Lai, le fondateur du journal indépendant hongkongais Apple Daily, a plaidé non coupable de tous les chefs d'accusation retenus contre lui dans un procès pour atteinte à la sécurité nationale. Dans ce procès, qui s'est ouvert en décembre, les preuves présentées par le parquet – notamment la désignation de “co-conspirateurs” étrangers – démontrent la nature fallacieuse des charges retenues contre lui.
“Non coupable”, c’est avec ces mots que Jimmy Lai, fondateur du journal hongkongais indépendant Apple Daily, a répondu aux accusations de “collusion avec des forces étrangères” et de “publications séditieuses” portées contre lui au sixième jour de son procès pour atteinte à la sécurité nationale. Ajourné pendant les vacances de Noël, ce procès, qui revêt une importance significative pour la liberté de la presse dans le monde entier, se déroule sans jurés et devrait durer 80 jours.
Jimmy Lai est accusé d'avoir utilisé Apple Daily comme tribune pour semer le trouble et organiser les manifestations de 2019 en faveur de la démocratie. Pour preuve de ce “crime”, le parquet a présenté, le 3 janvier, un message que Jimmy Lai avait envoyé à Benedict Rogers, le directeur de Hong Kong Watch, une organisation non gouvernementale (ONG) qui se consacre à la défense de l'état de droit à Hong Kong, pour lui demander de l'aider à obtenir un commentaire de l'ancien gouverneur du territoire sur le projet de loi d'extradition controversé de 2019. Ce texte avait entraîné une série de manifestations d’ampleur à Hong Kong.
“Les derniers développements dans le procès absurde intenté contre Jimmy Lai sont très préoccupants. Ils démontrent une fois de plus la nature fallacieuse des accusations portées contre le fondateur d’Apple Daily. Taxer des défenseurs des droits de l’homme de “co-conspirateurs” pour avoir simplement fait leur travail, en dénonçant les violations des droits de l'homme à Hong Kong, apporte la preuve, s’il en fallait, que le régime chinois redouble d’efforts pour contrôler l’information au-delà de ses frontières. La communauté internationale doit impérativement rester vigilante sur ce procès et condamner ces violations flagrantes de la liberté d’informer, qui ont des implications mondiales et nous affectent tous.
Les procureurs ont également invoqué plus de 150 articles d’Apple Daily comme exemples de “publications séditieuses” et ont désigné plusieurs défenseurs des droits de l'homme avec lesquels Jimmy Lai avait été en contact ces dernières années comme “co-conspirateurs” en collusion avec des forces étrangères. Parmi les personnes citées figurent Benedict Rogers ; Luke de Pulford, directeur exécutif de l'Alliance interparlementaire sur la Chine (IPAC), un groupe international de législateurs critiques à l'égard du bilan de la Chine en matière de droits de l'homme ; Bill Browder, responsable de la campagne Global Magnitsky Justice ; ou encore Finn Lau, activiste et directeur du média hongkongais en exil The Points.
Détenu dans une prison de haute sécurité depuis décembre 2020, Jimmy Lai a déjà été condamné à cinq ans et neuf mois de prison sur la base d'accusations montées de toutes pièces. Il avait auparavant écopé de 20 mois de prison pour avoir assisté à quatre manifestations pro-démocratie “non autorisées” en 2019 et en 2020. Jimmy Lai s'efforce depuis 25 ans de défendre les valeurs du pluralisme des médias et de la liberté de la presse à Hong Kong. Cet engagement a d’ailleurs été récemment salué par la ville française de Lyon, qui lui a accordé la citoyenneté d'honneur.
En décembre 2023, une délégation de Reporters sans frontières (RSF) s'est rendue à Hong Kong pour assister à l'ouverture du procès historique de Jimmy Lai pour atteinte à la sécurité nationale, faisant la queue dès 5 heures du matin pour obtenir une place dans la salle d'audience. Parmi la centaine de personnes présentes au tribunal ce jour-là, figuraient des diplomates étrangers ainsi que des membres de la famille de Jimmy Lai.
La Chine utilise régulièrement la loi sur la sécurité nationale comme prétexte pour poursuivre journalistes et défenseurs de la liberté de la presse, parmi lesquels Jimmy Lai et six employés d’Apple Daily. Le journal en lui-même a été fermé – une mesure considérée comme le dernier clou dans le cercueil de la liberté de la presse à Hong Kong.
Hong Kong occupe la 140e place sur 180 dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2023 de RSF, ayant dégringolé de la 18e place en l’espace de deux décennies. La Chine elle-même occupe la 179e place sur 180 dans ce classement et est le pays qui détient le plus grand nombre de journalistes et de défenseurs de la liberté de la presse, avec au moins 121 personnes détenues, dont 12 à Hong Kong.