"Dix ans après les faits, il est urgent que les tenants et les aboutissants de cette affaire éclatent au grand jour. Nous attendons que les espoirs de la famille de JPK et ceux des membres de son comité de soutien soient confirmés par une instruction transparente n'écartant pas a priori la piste professionnelle”, a déclaré l'organisation.
A quelques jours du dixième anniversaire de la disparition de l'ancien rédacteur en chef du quotidien polynésien
Les nouvelles de Tahiti,
Jean-Pascal Couraud (« JPK »), le 15 décembre 2007, Reporters sans frontières appelle les autorités françaises et notamment la garde des Sceaux, Rachida Dati, à renouveler leur engagement en faveur de l'établissement de la vérité sur les circonstances exactes de la mort du journaliste.
“De récents événements nous permettent de croire que l'enquête sur la mort de Jean-Pascal Couraud pourrait repartir sur des bases saines. Dix ans après les faits, il est urgent, tant d'un point de vue moral que juridique, que les tenants et les aboutissants de cette affaire éclatent au grand jour. Nous appelons la justice française à ne pas fournir d'arguments à ceux qui pensent que la Polynésie française est une zone d'exception où l'affairisme est roi. Au contraire, nous attendons que les espoirs de la famille de JPK et ceux des membres de son comité de soutien soient confirmés par une instruction transparente n'écartant pas a priori la piste professionnelle”, a déclaré Reporters sans frontières.
“Le travail de Jean-Pascal Couraud concernait, entre autres, des transferts de fonds supposés sur un compte japonais, à travers un compte polynésien, en faveur de l'ancien président de la République, Jacques Chirac. Le caractère sensible de cette information et la disparition tragique de JPK rendent plus impérieuse encore la découverte de la vérité dans cette affaire”, a précisé l'organisation.
L'année 2007 a permis des avancées. En septembre, les parties civiles ont enfin pu obtenir copie du dossier, dont la consultation a renforcé leur conviction que le journaliste avait été assassiné. Le 20 novembre, elles ont obtenu satisfaction de la chambre d'instruction de Papeete sur deux points : le versement au dossier des pièces saisies au domicile du général Rondot, dans le cadre de l'affaire Clearstream, se rapportant au compte japonais de l'ancien président de la République et le dessaisissement du juge Philippe Stelmach jusque-là en charge de l'affaire.
Selon l'avocat des parties civiles, maître Max Gatti, la découverte de deux documents relatifs à un compte appartenant à Gaston Flosse sur le disque dur du général Rondot prouve la menace que pouvaient constituer les documents dont JPK disait disposer. En mai 2007, l'ancien avocat du journaliste, Jean-Dominique Des Arcis, avait confirmé que JPK détenait des informations précises sur des transferts de fonds entre une grosse entreprise de Polynésie française et un compte détenu par Jacques Chirac. L'avocat sera entendu par le juge le 17 décembre prochain. La justice polynésienne a autorisé les parties civiles à vérifier qu'il est possible d'établir un lien entre ces notes et leur plainte déposée pour “assassinat et complicité” en 2004.
Le juge Stelmach, qui avait demandé à être dessaisi de l'affaire à de nombreuses reprises et avait informé, en juillet 2007, les parties civiles de sa volonté de clore le dossier, a été remplacé par le juge Jean-François Redonnet.
Enfin, sollicitée par la famille et le comité de soutien au journaliste, en juin et septembre derniers, la garde des Sceaux, Rachida Dati, les a assurés, à la mi-novembre, que “la direction des Affaires criminelles avait été saisie du dossier et qu'il serait étudié avec la plus grande attention”.
En novembre 2007, le parquet a rendu un réquisitoire de non-lieu, sans attendre la décision de la chambre d'instruction de Papeete. Il est urgent que les parties civiles puissent rapidement exposer au magistrat leur version de l'affaire et les éléments l'étayant. Il est également essentiel que les pièces de l'affaire Clearstream soient transmises dans les meilleurs délais.
JPK a disparu le 15 décembre 1997, et son corps n'a jamais été retrouvé. En octobre 2002, le tribunal de Papeete a conclu au suicide et prononcé un non-lieu. En 2004, l'enquête a été rouverte après le témoignage d'un ancien membre du Groupe d'Intervention de la Polynésie (GIP, service d'ordre personnel de l'ancien président de la Polynésie française Gaston Flosse). Vetea Guilloux a déclaré avoir assisté à l'assassinat de Jean-Pascal Couraud perpétré par des membres du GIP, avant de revenir sur ses déclarations. En décembre, la famille du journaliste a déposé “plainte contre X” avec constitution de partie civile pour “assassinat“ et “complicité “.
Reporters sans frontières soutient leur recherche de la vérité.
Le 16 décembre 2007, de 9 à 10 heures, France Inter diffusera dans l'émission « Interception » un reportage de Benoît Collombat consacré à la disparition de Jean-Pascal Couraud intitulé “ Des requins en eaux troubles - Contre-enquête sur l'affaire JPK “.
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