Désinformation et propagande de guerre russe diffusées par Eutelsat : RSF saisit l’ARCOM

Reporters sans frontières (RSF) saisit l’ARCOM pour lui demander de mettre en demeure l’opérateur satellitaire français Eutelsat de cesser la diffusion en Russie de trois chaînes qui sont des fers de lance de la propagande de guerre du Kremlin.

La France ne peut tolérer une situation où des opérateurs relevant de sa juridiction contribuent à la propagande de guerre du Kremlin, en méconnaissance de leurs obligations légales. Le régulateur français de l’audiovisuel a les moyens de mettre fin à cette situation, et nous l’appelons à agir sans délai.

Christophe Deloire
Secrétaire général de Reporters sans frontières

Ce 8 septembre, Reporters sans frontières (RSF) a saisi formellement l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM, anciennement le CSA), pour lui demander de mettre en demeure l’opérateur satellitaire Eutelsat de cesser la diffusion de trois chaînes russes de désinformation et de propagande vers la Russie. La requête, longue de six pages, est accompagnée d’un rapport de 266 pages.

Les contenus que celles-ci diffusent, incitant à la haine ou au génocide, contreviennent en effet aux obligations imposées par la loi aux médias audiovisuels comme aux opérateurs satellitaires, relatives au respect de la dignité humaine, à la sauvegarde de l'ordre public, ou encore à “l'honnêteté, l'indépendance et le pluralisme de l'information et des programmes qui y concourent”. 

Le 13 juillet dernier, RSF avait appelé les autorités françaises l’État français est actionnaire à hauteur de 22,65 % de la société Eutelsat, et la France est dépositaire de la convention internationale EUTELSAT IGO à mettre fin à cette contribution d’Eutelsat à la propagande russe, et à obtenir d’Eutelsat qu’il réattribue les canaux ainsi libérés à des médias d’information indépendants. La saisine de l’ARCOM vise aujourd’hui, par un autre moyen, le même objectif.

La société Eutelsat, un des principaux opérateurs satellitaires au monde, distribue vers la Russie et l’Ukraine occupée, par l’intermédiaire de plusieurs satellites, les bouquets russes NTV+ et Trikolor. Ces deux fournisseurs, qui comptent environ 15 millions d’abonnés, soit environ un tiers des foyers abonnés russes et 25 % des ménages de la Fédération de Russie, diffusent des chaînes TV telles que Rossiya 1, Perviy Kanal ou NTV. Soit les fers de lance de la machine russe de propagande de guerre.

Ces trois chaînes diffusent en effet à longueur d’émission des propos relevant, en droit français, de l’incitation à la haine et à la violence contre la population ukrainienne, des appels à l’extermination de masse ou des appels au meurtre de dirigeants, voire de l’incitation au génocide.

Or, diffusées par la capacité satellitaire d’un opérateur français, ces trois chaînes relèvent de la juridiction française, et en particulier du contrôle de l’Autorité de régulation des communications (ARCOM, anciennement le CSA) - en application de la loi de 1986 sur l’audiovisuel. 

Le recours déposé auprès de l’ARCOM par l’avocat de RSF Patrice Spinosi est accompagné d’un rapport détaillé, élaboré en lien avec le Comité Diderot (un collectif de promotion de la libre circulation de l’information, fondé par deux experts des médias en mars 2022), qui notamment compile un très grand nombre d’extraits d’émissions diffusées par les trois chaînes en cause et qui liste les satellites d’Eutelsat qui les diffusent.

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