Condamné en Chine il y a cinq ans, l'éditeur suédois Gui Minhai reste introuvable
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Condamné par les autorités chinoises le 24 février 2020 sur des accusations d'espionnage montées de toutes pièces, l'éditeur Gui Minhai est victime d’une disparition forcée. Malgré le combat incessant de sa fille unique pour obtenir sa libération, les autorités chinoises n'ont donné aucune information sur son sort depuis cinq ans. Reporters sans frontières (RSF) exige des réponses : où est Gui Minhai, citoyen suédois, et pourquoi n’a-t-il pas bénéficié de la protection consulaire à laquelle il a droit en vertu des conventions internationales ?
L’un des fondateurs de Mighty Current, maison d’édition réputée pour ses enquêtes sur la politique chinoise, Gui Minhai, est devenu une figure emblématique des 124 journalistes et défenseurs de la liberté de la presse actuellement détenus en Chine. Il écrivait et publiait des ouvrages sur des sujets politiquement sensibles, un crime aux yeux du régime chinois, qui l’a enlevé en Thaïlande, avant de le condamner à dix ans de prison sur la base d’accusations d’espionnage montées de toutes pièces.
Angela Gui, sa fille unique, est sans nouvelles de lui depuis le jour de sa condamnation. Les autorités chinoises lui ont systématiquement refusé tout contact avec lui et affirment qu’il est traité conformément à la loi en tant que citoyen chinois, bien qu'il ne possède qu'un passeport suédois. Angela Gui a fait part de ses inquiétudes à RSF : “Depuis l’annonce de sa condamnation il y a sept ans, je n’ai reçu aucune nouvelle de mon père. Étant sa fille, je suis très inquiète pour sa santé, surtout au vu des actes de torture et des mauvais traitements qui sont largement documentés dans les prisons chinoises. Cinq ans après sa condamnation, nous ignorons toujours où il se trouve et s’il reçoit les soins dont il a besoin” a-t-elle déploré.
“En agissant avec un manque évident de fermeté, la communauté internationale a permis au régime chinois de s’arroger le droit d’enlever des citoyens de n’importe quel pays, où qu’ils se trouvent dans le monde, de les détenir arbitrairement et de leur refuser la protection consulaire à laquelle ils ont droit. Nous appelons le gouvernement suédois et les États membres de l’Union européenne à intensifier la pression sur Pékin et à tout mettre en œuvre pour que les conditions de détention de l’éditeur soient enfin rendues publiques – et qu’il soit enfin libéré.
Gui Minhai a été enlevé le 17 octobre 2015, en Thaïlande, par des agents présumés des services de renseignement chinois, alors qu'il était en vacances. Trois mois plus tard, il a réapparu sur la télévision d'État chinoise pour une confession forcée. Après deux ans de détention, il aurait été libéré, mais en réalité, il restait sous surveillance étroite de l’État chinois. En 2018, il a de nouveau été arrêté par la police dans un train en direction de Pékin alors qu’il était accompagné de deux diplomates suédois. Deux ans plus tard, le régime chinois a annoncé sa condamnation à dix ans de prison pour avoir “illégalement fourni des renseignements à l’étranger”.
Gui Minhai n'est pas le premier à avoir été victime d'une disparition forcée après avoir publié des textes déplaisant à Pékin. Entre octobre et décembre 2015, quatre autres éditeurs de Mighty Current ont disparu. Tous ont réapparu dans les années suivantes, mais sont restés silencieux sur leur expérience, par peur des représailles.
Classée 172e sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2024 de RSF, la Chine est la plus grande prison au monde pour les journalistes et les défenseurs de la liberté de la presse.