Colombie : RSF réclame une enquête exhaustive sur le meurtre du blogueur Jaime Vásquez
Le blogueur et chroniqueur politique et judiciaire Jaime Vasquez, connu pour dénoncer depuis 2020 la corruption, a été abattu le 14 avril à Cúcuta, ville frontalière du Venezuela. Reporters sans frontières (RSF) exhorte les autorités judiciaires à mener une enquête approfondie et à traduire en justice les auteurs de ce meurtre.
Jaime Vasquez vivait sous escorte policière depuis 2022, à la suite de menaces de mort. Ses publications sur les réseaux sociaux dénonçant la corruption de la classe politique de Cúcuta, dans le nord de la Colombie dérangeaient. Ce blogueur, avocat de profession, a été abattu à l'intérieur d'une boulangerie, où il s'était réfugié après avoir été suivi par deux individus à moto. Il venait de sortir de chez lui, seul, son garde du corps étant en repos hebdomadaire.
Sur sa page Facebook, suivie par plus de 72 000 abonnés, il dénonçait des détournements de fonds publics, et abordait des questions sociales telles que l'accès à l’eau et aux soins médicaux. Apportant à ses propos incisifs un éclairage juridique, il avait été récemment intimidé par des membres du conseil municipal de Cúcuta. L’un d’entre eux avait d'ailleurs déjà tenté de l'agresser physiquement en 2022.
“Le brutal assassinat de Jaime Vasquez, malgré le dispositif de protection policière dont il bénéficiait, représente une grave atteinte au droit d’informer. RSF appelle les autorités judiciaires à mener une enquête approfondie et transparente afin de révéler au plus vite le motif de ce meurtre, en identifier les auteurs et les traduire en justice. Ce crime odieux envers un blogueur renommé, informant de malversations politiques dans l’intérêt général, est une menace pour l’exercice du journalisme et l’existence même d’un débat public dans cette région qui connaît une recrudescence alarmante des violences dues à la forte présence de groupes armés.
Jaime Vasquez avait dénoncé à plusieurs reprises les menaces dont il faisait l’objet, comme lors d’un live Facebook, republié sur TikTok deux jours après sa mort, dans lequel il évoquait un projet d’assassinat contre lui, discuté lors d'une réunion publique à Bogotá en présence d’un élu de Cúcuta.
Une zone à risque
Dans un message publié le 14 avril sur le réseau social X, le président colombien Gustavo Petro a appelé la nouvelle procureure générale de Colombie à mener une enquête sur ce crime, qui devrait inclure l’examen du téléphone portable de la victime, apparemment manipulé par des fonctionnaires dans les heures qui ont suivi l’assassinat. Deux jours après la mort de Jaime Vasquez, Jhon Jairo Jacome Ramirez, directeur de la page d'information locale Movilidad Cúcuta, a déclaré avoir reçu des messages anonymes sur son téléphone portable lui ordonnant de “se tenir tranquille”. Il avait rencontré Vasquez quelques jours plus tôt.
Cet assassinat intervient dans un contexte de recrudescence de la criminalité et de la violence dans la région de Cúcuta, où agissent plus de 25 groupes armés, y compris des gangs de trafiquants et de passeurs du Venezuela voisin. En moins de quatre jours, 16 personnes ont été assassinées dans l'agglomération.
Jaime Vasquez est le deuxième journaliste assassiné en 2024 en Colombie. En janvier, Mardonio Mejia Mendoza, fondateur et directeur de la radio indépendante Sonora Estéreo, a été abattu devant son domicile par des hommes armés circulant à moto à San Pedro, également dans le nord du pays.