Coronavirus en Egypte : une douzaine de sites et de pages internet déjà bloqués
Les autorités égyptiennes ont bloqué une douzaine de sites Internet d’informations et de comptes suivis sur les réseaux sociaux pour “diffusion de fausses nouvelles” dans la couverture médiatique liée au Coronavirus. RSF réitère l’importance de la fiabilité des informations dans ce contexte mais appelle les autorités à plus de transparence sur les motifs des blocages.
Depuis le mois de mars, le Conseil suprême de régulation des médias (SCMR) - principal organe de régulation en Egypte - a annoncé avoir bloqué une douzaine de sites accusés de propager des “rumeurs” liées à la pandémie de coronavirus, sans préciser systématiquement le nom des sites visés, ni ce qui avait été précisément retenu contre eux.
Plusieurs sources locales confirment cependant que le 15 mars, deux sites d’informations, celui du média en ligne Huna Aden et du quotidien El Gomhoria El Youm ont été bloqués pour six mois. Quelques jours avant la sanction, le représentant légal du journal avait été convoqué par le SCMR après la parution d’un article suggérant que le ministère de la Santé était parvenu à trouver un traitement contre le coronavirus. Six pages Facebook et Twitter ont également été suspendues dans le même temps, sans plus de précisions.
Deux semaines plus tard, le SCMR a examiné une plainte déposée par la ministre de la Santé contre un média qui lui aurait “attribué des déclarations qu’elle n’avait pas prononcées” et qui aurait également “remis en doute la capacité des hôpitaux publics” à faire face à la crise sanitaire. Cette fois, quatre pages supplémentaires ont été bloquées sur Facebook et Instagram. Le SCMR invoque des comptes à l’origine de publications qui “incitent à violer les mesures préventives prises par l'État” contre la pandémie. Une autre chaîne privée, dont le nom n’a pas été communiqué, a pour sa part écopé d’un avertissement, après avoir évoqué sur son antenne une pénurie de médicaments. Le Conseil étudie également la possibilité de bloquer douze autres pages internet et doit se réunir prochainement pour délibérer à ce sujet.
“L’information fiable et de qualité est primordiale en ces temps de pandémie mais elle doit aussi être libre et indépendante, réagit Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient de Reporters sans frontières (RSF). Les autorités égyptiennes doivent faire preuve de plus de transparence sur les motifs de blocages des informations en ligne et être à même de prouver qu’elles ont été publiées dans l'intention réelle de répandre des rumeurs et de 'troubler l’ordre public'.”
Le 20 mars, la journaliste du Guardian Ruth Michaelson a été expulsée du pays, à la suite d'un article qui citait une étude scientifique remettant en question l’ampleur réelle de l’épidémie dans le pays. Les autorités l’ont accusée d’avoir participé à une “tromperie délibérée sur un sujet grave” et lui ont reproché de s’être reposée sur “une seule source”.
Depuis 2018, la loi égyptienne permet aux autorités, notamment au SCMR, d’intervenir et de prendre des mesures contre les médias, les sites Internet et les comptes personnels en ligne suivis par 5 000 abonnés et plus. Jusqu’à aujourd’hui, plus de 500 sites Internet ont été bloqués dans le pays pour “diffusion de fausses informations”, y compris le site de RSF.
L’Egypte occupe la 163e place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.