A l'occasion du troisième anniversaire de l'assassinat du célèbre journaliste et humoriste Jaime Garzón, un spot contre l'impunité (
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Pour Reporters sans frontières et le réseau Damoclès, alors que le procès des assassins présumés a débuté dernièrement, cette initiative vise à maintenir l'attention de la société colombienne sur les suites d'un assassinat qui provoqua, en août 1999, une mobilisation sans précédent dans le pays. Lors des funérailles du journaliste, plusieurs centaines de milliers de Colombiens étaient descendus dans la rue lui rendre un dernier hommage. Les deux organisations se sont par ailleurs constituées partie civile dans cette affaire.
Pour leur part, en diffusant cette campagne, les cinq stations colombiennes ont ainsi souhaité unir leur voix à tous ceux qui demandent justice pour Jaime Garzón. Pour ces dernières, c'est également l'occasion de démontrer la solidarité de la presse face aux agressions dont elle est victime.
Reporters sans frontières et le réseau Damoclès espèrent que la poursuite de la mobilisation autour de l'affaire Jaime Garzón créera un précédent important dans la lutte contre l'impunité dont bénéficient trop souvent les assassins de journalistes en Colombie. Au cours des dix dernières années, une quarantaine d'assassinats de professionnels de l'information ont été recensés dans ce pays, pratiquement tous restés impunis à ce jour. "Seule l'attention que continueront de porter à cette affaire la société colombienne et les médias permettra de rompre le cercle vicieux de l'impunité dans lequel est enfermée la liberté de la presse en Colombie", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières.
Le texte du spot
Le spot qui sera diffusé par les stations colombiennes, d'une durée de quarante secondes, insiste sur la nécessité de lutter contre l'impunité et l'importance de la liberté de la presse pour la société colombienne :
"13 août 1999 -13 août 2002. Il y a trois ans, le journaliste et humoriste Jaime Garzón était abattu à Bogotá. Ce jour-là, tombait sous les balles celui qui savait nous faire rire en nous informant. Depuis, plus de dix journalistes ont été tués pour avoir voulu, comme lui, dénoncer ceux qui bafouent nos droits. Chaque assassinat est un coup porté à nos libertés. Tolérer que les assassins de Jaime Garzón restent impunis, c'est accepter qu'ils recommencent, encore et encore… Avec Reporters sans frontières et le réseau Damoclès, continuons à demander justice. Justice pour Jaime Garzón."
Reporters sans frontières et le réseau Damoclès déjà partie civile
Reporters sans frontières et le réseau Damoclès se sont constituées partie civile lors de l'ouverture du procès des assassins présumés du journaliste, début juillet 2002. Les deux organisations sont représentées par l'avocat Alirio Uribe, de l'association Colectivo de Abogados José Alvear Restrepo. Les audiences sont présidées par le juge de la septième chambre pénale de Bogotá, Julio Roberto Ballesta Silva.
Préoccupées par la tournure de l'enquête - des témoignages mettant en cause des militaires auraient été écartés un peu rapidement par les enquêteurs -, Reporters sans frontières et le réseau Damoclès ont ainsi souhaité participer au déroulement du procès. "Nous espérons que les éléments de preuves qui n'ont pas été examinés par les enquêteurs lors de la phase d'investigation le seront enfin lors des audiences", avaient souligné Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, et Jean-Pierre Getti, vice-président du réseau Damoclès, dans une lettre adressée le 11 juillet dernier au juge Ballesta Silva. Pour les deux organisations, cette démarche est la première du genre en Amérique latine.
Rappel des faits
Jaime Garzón, journaliste et humoriste à la station Radionet et à la chaîne de télévision Caracol Televisión, a été abattu le 13 août 1999 à Bogotá par deux hommes à moto. Le 2 janvier 2002, le juge d'instruction en charge du dossier, Eduardo Meza, a clos l'enquête. Celle-ci conclut à un assassinat commandité par Carlos Castaño, le chef des Autodéfenses unies de Colombie (AUC, paramilitaires) et exécuté par Juan Pablo Ortiz Agudelo, alias El Bochas, l'auteur des coups de feu, et Edilberto Antonio Sierra Ayala, alias Toño, le conducteur de la moto. Ces deux derniers ont été arrêtés respectivement en janvier 2000 et septembre 2001. Un mandat d'arrêt a été délivré contre Carlos Castaño en juin 2000.
Le mobile de l'assassinat serait la participation de Jaime Garzón dans des négociations en vue d'obtenir la libération de personnes enlevées par la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Le chef des paramilitaires aurait reproché au journaliste d'avoir fait ainsi le jeu de la guérilla mais également d'avoir touché de l'argent en échange de ses services. Certaines informations publiées par la presse font cependant mention de témoignages écartés par les enquêteurs qui mettaient en cause des militaires. Selon ces informations, certains secteurs de l'armée auraient craint les révélations du journaliste sur leur implication présumée dans des trafics avec la guérilla des FARC d'armes et de personnes enlevées. Les enquêteurs affirment que ces témoignages ne sont confirmés par aucune preuve. Après la clôture de l'enquête, le dossier a été transmis au juge de la septième chambre pénale de Bogotá.